Le mendiant boutonneux
1 - Le mendiant boutonneux
Dans un village, il y a bien longtemps, vivait un mendiant, tout boutonneux.
Personne ne voulait l'approcher, parce qu'il était victime d'une malédiction, et tous les gens du village le fuyaient. Il recevait de temps en temps des restes de nourriture, des vêtements usés, et vivait dans un taudis fabriqué avec des morceaux de bois, de toile trouée ; il était seul, sans ami, sans chien, sans famille.
Or, cet été-là, il fait très chaud, tellement chaud que le mendiant a besoin de se désydrater s'il ne veut pas mourir. Il y a une rivière non loin du village, et son eau fraiche est idéale pour se désaltérer, mais aussi pour se rafraîchir. La rivière n'est pas sèche, fort heureusement, et le mendiant décide de boire son eau. Il se penche pour boire quand il aperçoit son visage qui se reflète dans l'eau claire, à son grand désespoir.
- Quelle malédiction horrible ! Que je suis laid ! Comment retrouver mon vrai visage, se lamente le mendiant ?
- Mais qu'attends-tu pour agir ? Dit une voix près de lui.
- Qui a parlé ? Demande le mendiant tout tremblant.
- C'est moi, le serpent. Tu ne m'as pas aperçu, mais j'attendais ta venue depuis longtemps. Si tu étais venu te laver plus souvent, on aurait pu se rencontrer plus tôt.
- Ne m'approche pas, ne me mords pas. Je suis maudit et même si les villageois me fuient comme la peste, je ne veux pas mourir.
- Mais dit le serpent, sais-tu que tu as le pouvoir de briser cette malédiction qui t'accable ?
- Ah oui, et comment ça, dis-moi, répond le mendiant boutonneux presque en colère.
- Je ne te fuis pas, moi, au contraire, je viens vers toi pour t'aider, alors ne me provoque pas, dit le serpent.
- Je ne voulais pas t'offusquer. Je suis désespéré, et je ne comprends pas de quel pouvoir tu me parles, dit le mendiant boutonneux.
- Regarde cette rivière, regarde profondément son eau. Elle a une révélation à te dire. Qu'attends-tu pour lui demander ?
Le mendiant boutonneux hésite. Une révélation ! Briser ma malédiction. C'est la chaleur qui m'accable, et je délire ! Mais après tous, je n'ai rien à perdre, au contraire. Alors le mendiant accepte la proposition du serpent.
- O rivière à l'eau pure, s'il te plait, dis-moi comment briser la malédiction qui s'est abattue sur moi depuis ma naissance.
La rivière coule, coule ; son eau est claire, transparente, mais si calme et le mendiant commence à douter du serpent.
- Est-ce que tu crois assez fort à ce que tu demandes ? Sinon la rivière ne répondra pas à ta question, explique le serpent.
Le mendiant comprend que son désir n'est pas assez fort. Et cette fois, il renouvelle sa demande, avec conviction.
A ce moment, la rivière devient plus agitée, et à travers ses remous, sort une parole, puis deux, puis plusieurs, à la grande surprise du mendiant boutonneux.
- Eh bien mendiant, j'ai entendu ta supplique. Maintenant, va à la recherche de la jeune fille aux cheveux d'or ; c'est elle la clé de ta malédiction. Elle va te délivrer si tu le désires très fort. Va, continue ton chemin, ne t'arrête pas, elle t'attend, dit la rivière.
- Mais où est cette jeune fille aux cheveux d'or ? Aide-moi, s'il te plait à la trouver. Je suis resté depuis ma naissance dans ce village, et je ne sais pas où aller.
A ce moment, le serpent propose son aide.
- Mendiant, je peux t'accompagner et te guider vers la jeune fille aux cheveux d'or, si tu es d'accord.
- Oh oui, j'accepte que tu me guides. Je suis prêt à te suivre pour briser la malédiction qui m'accable, répond le mendiant.
- Je sais où est la jeune fille aux cheveux d'or, elle se trouve à la source de cette rivière, dit le serpent.
- Et cette source est loin ?
- Assez loin, en effet, il faudra marcher plusieurs jours pour y parvenir. Mais c'est ton seul désir qui peut te sauver, te rendre beau, alors, que faisons-nous ? Demande le serpent.
- Oui, allons-y, et sache que j'apprécie ton aide précieuse pour moi.
- Alors, longeons la rivière, et quand il fera trop chaud, nous nous protègerons de la chaleur sous les arbres.
La marche commence ; le mendiant est confiant en son nouvel ami le serpent. Il connaît la solution à son malheur. Quelle chance pour lui.
2 - la marche vers la source
Et pendant qu'il marche, le mendiant tout à sa joie de briser bientôt sa malédiction, partage un peu sa vie au serpent, qui l'écoute attentivement. Il parle de ses difficultés à vivre avec sa famille quand il était enfant, adolescent, des railleries des copains de ses frère et soeur, des refus des artisans de l'embaucher, et de ce qu'il est devenu plus tard, sans argent, sans famille, sans amis, sans domicile : un mendiant.
- Te souviens-tu à quel âge la malédiction t'a frappée ? Questionne le serpent. Et aussi comment t'appelles-tu ?
Alors commence pour le mendiant boutonneux une recherche ; mais oui, quand cela a-t-il commencé ? Se demande-t-il.
- Eh bien je m'appelle, je m'appelais... Mais comment je m'appelais ? Je ne me souviens plus, on m'a tout de suite surnommé le boutonneux, et j'ai oublié mon prénom.
Le mendiant est triste, il cherche, cherche dans sa mémoire.
- Je me rappelle mes parents et mon frère et ma soeur, et papa était toujours en colère après moi, parce que je n'apprenais pas bien à l'école, et aussi parce que je ne trouvais pas de travail. Tout le monde m'appelait le boutonneux, alors je ne sais plus quel est mon prénom. Serpent, est-ce que tu peux m'aider ? Supplie le mendiant.
- Il est important que tu fasses un effort, parce que tout est dans ta mémoire et tu peux la retrouver, explique le serpent. Ne la force pas, mais si tu y réfléchis, tu vas te rappeler ce qui s'est passé au moment de la malédiction.
La marche est longue, le mendiant reste dans ses pensées, le serpent à ses côtés. Pendant quarante jours, il essaie avec son ami, de remonter le fil du temps depuis son plus jeune âge. Et doucement, les souvenirs ressurgissent. Oui, le mendiant se souvient maintenant de son prénom : René ! Victoire ! Mais à sa naissance, est-il déjà maudit ?
- Si tu retrouves ta mémoire, tu pourras comprendre la cause de ta malédiction, explique le serpent.
- Oui, mais la rivière m'a simplement demandé de rechercher la jeune fille aux cheveux d'or, pas de fouiller dans ma mémoire pourquoi je suis tout boutonneux, rétorque René.
- Tu n'as jamais cherché à comprendre ce qui t'est arrivé ? Interroge le serpent tout surpris.
- Non, j'ai accepté mon sort comme une malédiction fatale, à laquelle je ne peux pas échapper.
- Eh bien, tu as entendu la rivière, elle t'invite à briser cette malédiction, et tu le peux, tu peux devenir celui que tu es depuis ta naissance, continue ta recherche. Continue à comprendre à l'intérieur de toi ce qui t'empêche de te transformer, dit son ami le serpent.
3 - La jeune fille aux cheveux d'or